Dans un arrêt du 5 janvier 2021, la Cour de cassation vient apporter des précisions intéressantes sur les moyens de nullité soulevés relatifs à la formation à juge unique en cause d’appel (1.) et sur la perquisition du véhicule par les inspecteurs de l’environnement (2.)

I. Les faits


Dans le cadre d’une opération de surveillance nocturne faisant suite au braconnage d’un cerf, des agents de l’office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) ont repéré un véhicule qui roulait lentement et s’arrêtait tous phares éteints avant qu’une source lumineuse portative ne balaie les champs alentour.
(Sur l’utilisation de sources lumineuses, voir : https://berger-avocats.org/amsdramebrame/)

Les agents ont procédé à un contrôle qui leur a permis de constater que ce véhicule, conduit par le prévenu, accompagné d’un passager, contenait une lampe torche, un couteau de chasse, une paire de jumelles à vision nocturne, une carabine, placée dans une housse non fermée, équipée d’une lunette de visée et chargée de trois balles dont l’une était engagée dans la chambre, ainsi que des munitions adaptées à cette arme.

Les deux protagonistes ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour chasse non autorisée en réunion de nuit avec usage d’un véhicule et port d’arme.

II. La procédure


Le tribunal correctionnel les a déclarés coupables des faits reprochés.

Suite à l’appel interjeté, la Cour d’appel de DIJON, chambre correctionnelle, dans son arrêt du 27 novembre 2019 confirmait le jugement de condamnation et, pour infraction à la réglementation sur la chasse, les a condamnés à trente jours-amendes de 100 euros, a ordonné le retrait du permis de chasser pendant deux ans, et prononcé une mesure de confiscation.

Les prévenus ont formé un pourvoi contre cet arrêt d’appel.

III. L’arrêt du 5 janvier 2021


A l’appui de ce pourvoi, deux moyens étaient soulevés :

Le premier moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a prononcé sur l’action publique et sur l’action civile, alors que la méconnaissance de l’obligation d’informer l’appelant, en début d’audience, du droit d’obtenir le renvoi de l’affaire à une formation collégiale de la chambre des appels correctionnels, lorsqu’il n’en a pas été avisé lors de la déclaration d’appel, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée.

Ainsi, en statuant à juge unique sur l’appel formé en date du 21 mars 2019, soit antérieurement au décret du 24 mai 2019 prévoyant la modification du formulaire de la déclaration d’appel, quand il ne résulte ni de l’arrêt, ni des notes d’audience, que l’appelant aurait été informé de son droit d’obtenir le renvoi de l’affaire à une formation collégiale, la chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel a violé les articles 16 de la Déclaration de 1789, 6, § 1er , de la Convention des droits de l’homme, préliminaire, 510, 592, 802 et D. 45-23 du code de procédure pénale.

Réponse de la Cour de cassation :

La Haute juridiction rappelle en son arrêt de rejet que les dispositions de l’article 510, issues de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, sont applicables à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur au 1er juin 2019, s’agissant de dispositions fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure.

Il en résulte que lorsque le jugement attaqué a été rendu selon les modalités prévues au troisième alinéa de l’article 398 ou selon celles prévues au troisième alinéa de l’article 464, la Chambre des appels correctionnels est composée d’un seul magistrat exerçant les pouvoirs confiés au Président de chambre, sauf si l’appelant demande expressément que l’affaire soit examinée par une formation collégiale.

L’article D. 45-23 du Code de procédure pénale précise que le Président de la chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel doit, en début d’audience, informer la partie appelante de son droit de demander le renvoi de l’affaire à une formation collégiale, lorsque celle-ci n’a pu en être informée dans le formulaire de la déclaration d’appel.

Cependant, le demandeur ne saurait se faire un grief de ce qu’il n’a pas reçu cette information, dès lors qu’il était assisté de son Avocat à l’audience du 10 octobre 2019.

Dès lors, le premier moyen n’est pas fondé.

Le second moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté les exceptions de nullité et a, en conséquence, déclaré le prévenu coupable de chasse non autorisée en réunion, de nuit, avec usage d’un véhicule et port d’arme et statué sur les intérêts civils, alors :

1°/ qu’en retenant, pour rejeter l’exception de nullité, que « les agents de l’ONCFS étaient parfaitement compétents pour procéder à la fouille du véhicule sans l’assentiment du prévenu », quand le pouvoir des inspecteurs de l’environnement de rechercher et constater, sans l’assentiment de la personne concernée, les infractions prévues par le Code de l’environnement en quelque lieu qu’elles soient commises et de suivre les animaux irrégulièrement prélevés dans tous les lieux où ils ont été transportés ne comporte pas celui de procéder à la visite d’un véhicule, lequel est assimilé au domicile, sans l’assentiment du conducteur, la Cour d’appel a violé les articles 8 de la Conv.EDH, préliminaire, 15, 78-2-3 du Code de procédure pénale, L. 172-5, L. 172-6 et L. 428-29 du Code de l’environnement ;

2 °/ qu’en toute hypothèse, en retenant, pour rejeter l’exception de nullité, que « les agents de l’ONCFS étaient parfaitement compétents pour procéder à la fouille du véhicule sans l’assentiment du prévenu », quand aucune disposition ne leur confère un pouvoir de perquisition autre que celui d’exiger l’ouverture des seuls carniers, sacs ou poches à gibier, la Cour d’appel a violé les articles 8 de la Conv.EDH , préliminaire, 15, 78-2-3 du Code de procédure pénale, L. 172-5, L. 172-6 et L. 428-29 du Code de l’environnement.

Réponse de la Cour de cassation :

Pour écarter le moyen de nullité selon lequel les agents de l’ONCFS n’avaient pas compétence pour perquisitionner le véhicule contrôlé, l’arrêt attaqué énonce qu’au vu des dispositions de l’article 172-5 du Code de l’environnement qui précisent les conditions dans lesquelles sont recherchées et constatées les infractions prévues par ce Code, ces agents étaient compétents pour procéder, sans l’assentiment du prévenu, à la fouille du véhicule qui, contrairement à ce qu’il affirme, ne saurait être assimilé à un domicile.

En l’état de ces énonciations, la Cour d’appel n’a méconnu aucun des textes visés au moyen.

En effet, la visite, sans l’assentiment de son occupant, par les inspecteurs de l’environnement, d’un véhicule qui ne revêt pas un caractère professionnel et ne constitue pas un domicile échappe tant au régime d’information préalable du procureur de la République prévu par les alinéas 2 à 4 de l’article L. 172-5 du Code de l’environnement, qu’à l’obligation de présence d’un officier de police judiciaire, prévue par le dernier alinéa de cet article.

(Sur les nouvelles compétences de police judiciaire des agents de l’OFB, voir : https://berger-avocats.org/pour-une-meilleure-justice-environnementale-les-nouveaux-atouts-de-la-loi-no-2020-1672-du-24-decembre-2020/)

Dès lors, le moyen n’est pas fondé. Le pourvoi est rejeté.