Par Me Benoît BERGER

ACCA et acquisition de terrain: Précisions sur les modalités d'accès aux associations communales de chasse agréées

Par un arrêt rendu le 3 décembre 2020 (N°19-21.052) la 3ème chambre civile de la Cour de cassation est venue appliquer aux modalités d’accès à une association communale de chasse agréée (ACCA) un principe essentiel du Droit civil, issu de l’article 2 du Code civil: le principe de non-rétroactivité des lois.

I. Les faits


Une ACCA a été créée le 2 septembre 1969. Par actes des 11 décembre 2007 et 16 juin 2008, le demandeur a acquis deux parcelles agricoles comprises dans le territoire de cette ACCA. Au cours de l’année 2014, il a sollicité la délivrance d’une carte de chasse, à laquelle l’ACCA s’est opposée.

Par acte du 20 août 2015, ce dernier a assigné l’ACCA en reconnaissance de la qualité de membre de droit et en indemnisation.

II. La Procédure


1/. Le tribunal de grande instance de VALENCE, dans un jugement du 20 Avril 2017, fait droit à cette demande et lui accorde le bénéfice des nouvelles modalités d’accès aux ACCA résultant de l’article 17 de la loi du 7 mars 2012 portant diverses dispositions d’ordre cynégétique qui a ajouté à l’article L 422-21 I du code de l’environnement un 5° conférant la qualité de membre de droit d’une ACCA aux acquéreurs d’un terrain soumis à l’action de l’association et dont les droits de chasse qui y sont attachés ont été apportés à cette association à la date de sa création. 2/. Appel est interjeté par l’association communale de chasse agréée. 3/. Par un arrêt rendu le 11 juin 2019, la Cour d’appel de GRENOBLE infirme le jugement querellé au motif que, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, l’article L 422-21 I 5° du Code de l’environnement susvisé ne s’applique qu’aux acquisitions de terrains postérieures à l’entrée en vigueur de ce texte (soit, le 09 mars 2012).

Les nouvelles modalités d’accès aux ACCA ne sauraient, dès lors, s’appliquer.

Un pourvoi est formé devant la Haute juridiction.

III. L’arrêt du 3 décembre 2020 (n°19-21.052)


Le demandeur au pourvoi fait grief à l’arrêt de la Cour d’appel de GRENOBLE de rejeter ses demandes tendant à se voir reconnaître la qualité de membre de droit de l’ACCA.

Il soutient qu’aux termes de l’article L.422-21, I, 5° du Code de l’environnement dans sa rédaction issue de l’article 17 de la Loi n°2021-325 du 7 mars 2012, les titulaires d’un permis de chasser validé sont membres de droit des ACCA, dès lors qu’ils ont fait l’acquisition d’un terrain soumis à l’action de l’association et dont les droits de chasse qui y sont attachés ont été apportés à celle-ci à la date de sa création.

Il soutient, à ce titre, que cette disposition ne distingue pas selon que l’acquisition est intervenue antérieurement ou postérieurement à son entrée en vigueur, de sorte que l’arrêt rendu doit être cassé.  

Réponse de la Cour de cassation :

La Cour confirme logiquement l’arrêt d’appel, en ce que les juges du fonds ont retenu à bon droit les dispositions de l’article 2 du Code civil, lequel dispose: « La loi ne dispose que pour l’avenir; elle n’a point d’effet rétroactif« .

Dans ces conditions, le demandeur n’était pas fondé à revendiquer le bénéfice des nouvelles modalités d’accès aux associations communales de chasse, telles qu’elles résultaient de L.422-21, I, 5° du Code de l’environnement, conférant la qualité de membre de droit d’une ACCA aux acquéreurs d’un terrain soumis à l’action de l’association et dont les droits de chasse qui y étaient attachés avaient été apportés à cette association à la date de sa création, dès lors que ce texte ne s’applique qu’aux acquisitions de terrains postérieures à son entrée en vigueur. Le moyen n’est donc pas fondé.

Commentaire :

Il résulte logiquement de cet arrêt et des dispositions susvisées que toute cession d’un terrain apporté à une association communale opérée avant la loi du 7 mars 2012 est sans effet au profit de l’acquéreur, auquel doit s’appliquer la jurisprudence classique antérieure selon laquelle le nouveau propriétaire n’est pas membre de droit de l’association, puisqu’il ne lui apporte lui-même aucun droit. Or, la condition de l’apport étant obligatoire, le nouveau propriétaire ne recueillait pas le droit d’être membre du fait de sa seule acquisition, si le droit de chasse a été antérieurement apporté à l’association par son auteur.

Le demandeur ne pouvait revendiquer aucun bénéfice de la nouvelle Loi, puisqu’il a acquis ses terres en 2008, apportées à l’ACCA créée en 1969… il n’aurait pu en profiter que s’il avait acquis ces mêmes terres après le 9 mars 2012.

Dès lors, il nous apparaît que le pourvoi, même fondé sur une l’atteinte au principe d’égalité, ne pouvait qu’être rejeté.

Pour aller plus loin: sur la responsabilité de l’organisateur de Chasse d’une ACCA: 
https://berger-avocats.org/association-communale-de-chasse-agreee-acca-et-responsabilite-de-lorganisateur-de-chasse-veille-juridique/